Mon âme est pareille à celle de l’arbre
bicentenaire. Son écorce craque
mais résiste aux révolutions, aux tempêtes
aux promesses éphémères. Chaque épreuve
est un trésor auquel, tout bien considéré,
j’accorde asile sur un de mes noeuds.
Le fragile appelle le plus grand des respects.
et ma vigilance de sève est à son écoute.
*
Quand l’homme vieillit, le voisinage aboie. Il ne suffit pas d’aménager la maison, il faut penser aussi à l’extérieur.
L’approche de la vieillesse n’est pas seulement un problème d’individu, elle demande aussi de porter attention au collectif.
Devenez tuteur et c’est d’un quartier dont vous devrez prendre soin. Une approche globale qui tient compte de l’ extérieur autant que de l’intérieur, est nécessaire… sinon vous entendrez ; « Virez-moi tout ça de l’intérieur, vite fait ! »
Et dans mon intérieur, mon mental, tout se bouscule et vertige le quotidien. » Pense à l’extérieur, Carmen. Il n’y a pas de vertige, la terre ne tremble pas. Tout est bien, tout est bon, seul le bien existe, le mal n’existe pas ! »
*
Baisse le son grand-père !
Ce n’est pas parce que tu es sourd que les voisins ont à supporter ta TV.
Tu ne veux rien entendre
tu ne te déplaces pas
à petits pas chassés
hésitant entre
l’avant et l’arrière
quand on sonne
à ta porte
à ta porte il y a
une lettre de menace
des voisins qui passent
et tu restes là
devant ta télé
*
Mais personne n’a sonné
il n’a rien entendu
sinon il vous aurait invité
à entrer, vous aurait proposé
un petit café. Grand père aurait
même trouvé assez d’énergie
pour vous apporter des chaises.
Une visite est toujours bienvenue
la télé, on l’éteint aussitôt.
Vous êtes la vie prenant forme
Sa vie à lui est si menue
alors qu’ elle vous paraît
monstrueuse et si bruyante.
*
Avant, je parvenais à m’occuper
Maintenant, mon Dieu, il ne me reste
que mon fauteuil et l’ambiance
vue à travers le petit écran.
Des voix m’atteignent
je les entends Haut
parfois ce sont des Rires…
La Joie nous parvient comme elle peut
pour nous toucher d’un lustre d’éclat.
C’est important une voix
quand la maison est pleine
d’absence.
Je dérange le voisinage ?
Eh bien, mince, alors !
Dites-moi, si je règle le son
comme ça, au minimum
que je puisse entendre,
dites-moi si pour vous
cela représente une nuisance
sonore. Mince, alors !
toute une vie à me montrer
discret et je comprends
tout à coup que la vieillesse
me rend indésirable.
Je vais demander à ma fille
elle saura peut-être nous aider
en attendant
puis-je regarder ma télé, aujourd’hui ?
.
Carmen P.
Ah comme c’est bien vu… C’est horrible, avoir vécu toujours de son mieux, en respectant les autres jusqu’à se priver soi-même, et devenir indésirable pour la seule raison qu’on est vieux. Notre société est remplie d’hypocrisie. On protège la vie tout en la bafouant.
Quand on assiste quelqu’un on est partagé entre la tendresse, on comprend les besoins de cette personne et la nécessité de rendre la présence la plus discrète possible pour le voisinage. Il faut répondre avec le sourire disant qu’on va résoudre le « problème », mais le coeur a envie de crier : « Vous ne voyez pas, c’est tout ce qu’il lui reste ! » C’est un déchirement.
Ton texte sur l’arbre est beau, tout comme l’image que tu as jointe. Oui, toutes ces expériences nourrissent l’écorce, et sa vieillesse remplie de blessures fait aussi sa force et sa beauté.
Je ne voulais pas ne raconter qu’une anecdote, d’où les deux textes précédents. La référence à l’arbre permet un retour sur la nature. Merci pour ta lecture, Mayalila.
Fond et forme sont magnifiques ! La vieillesse, ce moment où chacun, il me semble, aimerait ou aimera lâcher prise et où les petites dégringolades intérieures nous obligent ou nous obligeront à rester vigilant(e)s… Difficile métier de la vie ! Merci pour ces très beaux textes Carmen, douce journée à toi. brigitte
Ces dégringolades, physiques et intérieures, si dures à vivre pour la personne et son entourage ne sont pas toujours bien acceptées par le voisinage. Oui, difficile, de les vivre ou de les accompagner. Merci d’être venue me lire, Brigitte.
Bonjour Carmen,
pas besoin d’être vieux. Mon père était sourd ( il avait perdu l’ouïe en combattant les allemands). Et, comme tu le décris, il devait monter le son de la tv , en dépit de son appareil auditif. Et cela a causé pas mal de problèmes avec les voisins des immeubles où nous habitions. C’est un souvenir douloureux.
Nos âmes choisissent des chemins plein de montées et de descentes, gazonnées ou caillouteuses.
Très belle page Carmen. Merci pour ce partage
😉
Oh comme je comprends ! Certains donnent tant, paient de leur personne, et on ne leur accorde que de l’agacement. Un viel homme sourd, comme un bébé qui pleure… on demande aux proches de les faire taire à tout prix. Coincé entre l’amour et l’accusation de nuisance sonore on jongle avec le sourire entre paroles réconfortantes et désarroi intérieur. Les hommes sont profondément individualistes et n’apprécient une situation qu’en fonction des désagréments, ou des intérêts qu’elle apporte. [Je pense que le Christ chaque jour est crucifié… je ne devrais pas le dire, mais c’est tellement évident].
les épreuves d’autrui ne peuvent laisser indifférent……prendre soin Carmen, se protéger…..avec toi en pensées….fais gaffe à toi, quoi, aussi…..
Prendre soin d’autrui sans s’oublier soi-même. Pas toujours facile. On essaie…
Les choses se calment, nous avons réussi à mettre de l’ordre au jardin (envahi de mauvaises herbes). J’ai l’esprit plus tranquille. Je m’organise pour pouvoir partir, un peu.
Merci d’être venue me lire, Anne.
Je sais, c’est dur.
Un bonhomme est venu me voir, très agressif : Vous ne pouvez pas parler moins fort ?;
Étonnée par mon propre calme, j’ai répondu simplement :.Non.
Mon beau-père n’entendait vraiment plus bien du tout.
Bisous
c’est bien pour ça que je vis seule, juste avec un chien qui croit que je suis la plus belle chose au monde.
Rassembler autour de soi ce et ceux avec qui la vie est douce ! C’est cela construire une maison. De l’intérieur vers l’extérieur (je ne savais pas si je t’avais répondu !
Cette image est une référence qui colle plutôt bien avec la vie de l’être humain. Laquelle m’apparait d’une année à l’autre aussi noueuse et torturée que l’arbre vieux.
Ainsi, même de nos jours nous continuons, quel que soit notre âge à rechercher la même symbiose.
Quoi qu’il se passe, confinement ou pas, il y a toujours cette volonté de communiquer malgré tout… quitte à le faire aussi via Internet, un peu comme les arbres qui, bien au delà de leurs racines, utilisent un vaste réseau souterrain… de champignons!
Je ne publie pas assez sur mon blog, Robert-Henri. Mes publications sont beaucoup plus lues sur FB… pourtant je préfère l’intimité des blogs. Il me faut entretenir « cette volonté de communiquer », sur les blogs également, en allant lire les autres. Bon week-end, Robeert-Henri.
Bonjour Carmen,
Les blogs en effet sont un peu comme ces « carnets intimes » voués à n’être lus que par soi-même… ceci s’appliquant si l’on n’entretient pas un minimum d’échanges de blog à blog…
J’ai tenté l’aventure FB, mais je n’ai pas fait d’Anglais ni d’informatique, et donc ne sachant guère comment manier cet outil, il s’est vite avéré que mon « jardin » ne verrait jamais de véritable éclosion. D’où mon repli sur B4 où j’entretiens aussi une version forum https://saperlotte.blog4ever.com/ qui me convient mieux.
Excellent week-end à vous aussi.