L’an fauve voit s’écouler tant de haine
se délier les liens des m’en ciels
Seules les larmes parviennent à réconcilier
la joie du vain coeur et les tentatives d’amour humiliées
sous-mise aux émotions – s’abandonner
*
quand nos petits pas
accompagnent inquiets
nos parents dans l’âge
et que leur vie s’évade
un cran après l’autre
une fois elle, une fois lui…
une main qui retient
un pied qui lâche
un sourire rassurant
la lucidité en éclaircie
un cri de révolte
suivi d’un soupir résigné…
nos âmes se balancent
au bord du vide qui les aspire
chaque jour questionne
l’incohérence du vivre
et la joie se délite
que la tristesse confond
*
Quand la mort tend son voile, elle drague le partant
et sa famille atteinte / longtemps souffre silence
Quand la mort tend son voile, quand l’espoir déchire
la vie en peau d’guenille, ne reste que la paix
jusqu’à ce que souffle s’évade – éperdument
*
Il avait un air de jamais plus
il donnait encore l’impression de vouloir suivre une voie
mais il portait cette tristesse que l’on ne peut partager
quand la raison s’abandonne à la fatalité
étreignant les élans de vie, jusqu’à la dernière brisure
Il avait un air de jamais plus
et je me suis arrêtée avec mes paroles au bord des lèvres
des paroles prêtes à chavirer toutes les résistances du corps
Je me suis arrêtée car je ne pouvais ignorer plus longtemps
l’intelligence de sa nature
*
Comment vivre
espérer s’épanouir
souhaitant à l’autre
pareil délice
sans insulter sa réserve
sans trahir sa patience
sans nier son expérience
sans éteindre ses possibles
(en le respectant jusqu’à l’extrême fin)
Comment vivre
en étreignant nos limites
pour ensemble les dépasser
(l’un sur terre, l’autre ailleurs)
*
La vie est si peu de chose
pourtant nous la cousons de fils multicolores
nous en humons les senteurs les plus subtiles
nous la hurlons dans nos colères et dans l’agitation de nos nuits
nous en jouissons depuis que nous avons bravé l’interdit de l’amour
La vie est si peu de chose
un ascenseur que l’on prend
pour dans une chambre visiter
une personne qui a compté et compte
si elle le veut bien encore, un petit peu plus longtemps
La vie est si peu de chose
une distance qui nous sépare
beaucoup plus grande qu’on ne le suppose
et l’ascenseur est un symbole
que je me refuse à prendre
Il y a le chemin avant l’ascenseur
et le chemin qui le suit, un couloir interminable
où je tangue car j’ai le pas mal assuré
puisque mon corps résiste au trajet;
Tout est déjà fini et je ne peux rien faire!
Nous allons parler de nos vies qui sont déjà passées pour toi
Nous tairons tes projets que l’au-delà garde secrètement
Nous dirons que tes visions ne sont pas hallucinations
que ces êtres qui attendent – bienveillants – te disent que ce n’est pas encore ton heure car ceux qui t’aiment t’espèrent parmi les vivants.
De quel côté penchera ton coeur ?
Je le sais : nous devenons inexistants à celui qui tend ses bras aux anges.
Etre de peu de foi, entre ancrage et spiritualité,
je me refuse à l’accompagnement
Pardon !
*
Un fruit, offrez une pomme
un arbre, plantez un pommier
un gâteau, pensez aux pommes
.
le vers n’est pas dans le fruit
et le serpent n’a plus de venin
si le verbe est dans la pomme
.
ô mythiques jardins
quand la vie abandonne
quand la vie abonde,
danse
.
Pomone dans son jardin
remplit son panier
elle entretient la flamme
.
Un brin de romarin
cueilli au potager terrestre
entre vos doigts….
pour le voyage
*
Toute création transcende la tristesse
alors je m’applique, je soulève le poids,
j’expérimente la légèreté, je m’accorde au superflu,
je crée un univers, pourvu de beauté et de rêve,
un paysage où poser la turbulence des pensées
– qu’il soit de laine, de fils, de mots ou de notes
il touchera de sa grâce les sourires d’âme –
.
Carmen P.
Sculpture de Jurga « Tu me manques »
Je ne sais quoi dire car ce sont des textes qui parlent ils sont magnifiques, chacun différent. J’ai beaucoup aimé le second qui nous parle de ceux qui sont nos parents arrivés en fin de vie, même s’ils ne le disent pas ainsi cela y ressemble..Leur donner encore du temps, les écouter quand ils ont encore envie de nous parler, d’avant, rarement de l’après mais il l’espère chaque jour.
Comme tu décris avec tes mots poétiques je suis rentrée de pleins fouet non pas dans ta vie et de ceux des tiens, mais moi face à mes parents…
Des mots …Mais non seulement, des mots qui donnent de la force à ceux qui ont terminé selon leur dire leur vie sur terre et qui aspirent à s’en aller…Alors face à cela on n’a plus de mots car nous voulons continuer à les chérir même si on sait que bientôt ce ne sera plus possible.
Merci et bisous
EvaJoe
Je suis littéralement absorbée par l’attention à accorder aux parents et beaux-parents. Mon beau-père est parti, je pense que nous avons tout fait pour le retenir parmi nous. J’ai rassemblé ici les textes qui sont venus dernièrement en pensant que d’autres pourraient s’y reconnaître. Je suis heureuse que tu les aies perçus ainsi, Eva.
La vie nous ne pouvons que la laisser courir.
Bonne semaine, EvaJoe.
Ta poésie est magnifique, Carmen.
On ne peut « commenter » en effet, ce qui n’est que cri du coeur. Comment arrêter les mots quand leur écoulement lui-même est la clef de ce texte, une beauté qui est dans la fluidité même de ce qui s’énonce ! On ne peut que rester suspendu à leur trame et, avec toi, découvrir que même souffrance est beauté, que vie est fluidité, et que tout est au final équilibre et harmonie.
Lire le commentaire qui suit, ma réponse n’étant pas apparue dans la bonne case !
Je trouvais ces mots éparpillés dénués de sens, c’est pourquoi je les ai rassemblés…. il y en aura d’autres au fil des mois ou des années… ce que j’aimerais consolider c’est mon attitude. Il n’y a pas à faire passer de la force et de l’amour (puisque l’amour es là et que la force physique s’échappe), et me laisser posséder par la conscience de ma vulnérabilité, de mon impuissance est douleur inutile…. tout cela doit être mis en sourdine, pour entendre l’autre, au mieux, pour le laisser être gagné par la paix. Merci, Aloysia, de me lire…. de relever la fluidité (vu le sujet, je pensais que le nombre de textes rassemblés pouvait être « pesant »).
Intensité de l’émotion,qui poursuit ces questions essentielles depuis la nuit des temps ,concernant la vie et la mort…
Des mots libérés,en une révolte poètique O combien belle ,incisive et lançant ces mots pétris et remodelés par un coeur touché ,retenant ses larmes, mais offrant des paysages et des voyages diversifiés,dans la turbulence des pensées ,puisque la vie n’est qu’une longue perte de tout ce que l’on aime..
Que l’apaisement soit en ton coeur ,mon amie ,dans cette période trés difficile pour toi ..
Merci Rivagedazur. Eh oui, nous tournons toujours autour des mêmes sujets. Si l’écriture pouvait être un baume, pour soi, pour autrui…. si on pouvait arrêter ces questionnements, ces états d’âme et simplement respirer et vivre, heureux, sans chercher en soi ou ailleurs la parole qui étanche, comme la vie serait simple et savoureuse !
Alors laissons le soin à la vie de le faire..et à l’esperance d’atténuer les lourds secrets de nos peines..
passants et passantes..
sur le fil des jours…….
…passants.