Voici mon histoire de Rayon de Lune. Ce conte pour jeunes lecteurs a été édité en 2010 et réédité ensuite, mais la maison d’édition s’est fermée, les livres sont dispersés… je ne peux même plus en acquérir quelques-uns afin de les proposer aux enfants lors des salons où je suis invitée.
Je vous livre ici le texte de l’histoire, afin que vivent les mots !
Rayon de lune
La lune est le rêve du soleil. Paul Klee
Il y a bien longtemps, la Lune et le Soleil se partageaient le ciel. Le Soleil apportait sa lumière aux hommes et aux plantes tandis que la Lune murmurait ses secrets au grand jour. Elle auréolait de son halo les amoureux ; les petits comme les grands. Il en avait toujours été ainsi, Lune et Soleil amis pour la vie. Mais un jour se passa une chose bien regrettable ; une dispute et… la Lune partit, disant qu’elle ne sortirait plus que la nuit. C’est ce qu’elle fit.
Hélas, la nuit il fait froid, et la Lune s’enrhuma. La pauvre éternuait tant et si fort que, à la suite d’un « Atchoum ! » explosif, elle perdit un bout de son écorce. Le morceau lunaire, après une longue chute, tomba dans la mer. À peine au contact de l’eau, ce morceau de lune fait de cailloux, de sable et de poussière d’étoile se transforma en une jolie petite fille au teint pâle et argenté.
Les poissons la nommèrent Rayon de Lune. L’enfant vécut quelque temps au fond de l’eau.Tout ce qu’elle voyait l’enchantait, et elle ne manquait pas d’amis. Malgré cela, elle avait toujours froid, rien ne parvenait à la réchauffer…
Un jour, elle entendit le ronronnement d’un moteur. Un bateau !
Curieuse, oubliant toute prudence elle s’approcha et… se sentit soulevée hors de l’eau ; elle venait de se faire piéger par le filet d’un pêcheur. Elle se trouvait maintenant sur un frêle esquif. En face d’elle, un vieil homme la regardait, il semblait bon et chaleureux.
Ah, cette chaleur ! D’où pouvait-elle provenir ? Du regard de l’homme ou de l’astre qui incendiait le ciel ? Sans nul doute cette douceur émanait de l’astre. Rayon de Lune se sentait merveilleusement bien avec ce soleil qui caressait sa peau blafarde. Elle ne voulut plus connaître le froid des profondeurs marines, ainsi demanda-t-elle au pêcheur de la ramener sur la terre ferme.
C’était compter sans le vent ! Le vent, arbitre des querelles entre le Soleil et la Lune, avait pour mission de veiller à ce que jamais le moindre éclat de lune ne profite d’un rayon de soleil. Il souffla donc si fort qu’une tempête se leva, renversant tout sur son passage, y compris le bateau et ses passagers. Alors les poissons formèrent tous ensemble un banc, nageant, ondulant ; un matelas vivant sur lequel l’enfant et le vieil homme se laissèrent transporter…
Arrivée sur la plage, la petite fille épuisée s’endormit. À son réveil, le vieil homme avait disparu, et à sa place se tenait maintenant une très vieille femme. L’enfant, toute tremblante de froid et de peur, lui raconta son histoire. La vieille femme lui proposa de l’héberger pour la nuit, elle fit un bon feu de cheminée et dit à l’enfant de s’en approcher… Rayon de Lune avait toujours froid.
La vieille femme jeta sur le brasier ses plus grosses bûches de chêne.La flambée était magnifique… mais l’enfant grelottait toujours.
» Je vois, dit la vieille femme, seule la magie pourra te délivrer, mais il faut que tu m’aides. Je ne peux te guérir seule ! Tu connais la mer et ses habitants, moi je connais ceux de la terre et l’un d’eux pourra t’aider, il te dira le moyen de te réchauffer. Mais auparavant, acceptes-tu d’aller chercher un anneau d’or que j’ai perdu il y a bien longtemps au fond de l’océan ? J’étais très attachée à cet anneau, de lui dépendait mon pouvoir magique. Depuis que je l’ai perdu, je me sens si seule, plus personne ne frappe à ma porte. Avec cet anneau, ma maison s’ouvrira aux braves gens qui cherchent leur route et je pourrai à nouveau les guider. Je redeviendrai la dame du bon chemin. Tu vois, moi aussi j’ai froid, sans amis à aider. »
Rayon de lune accepta de bon cœur. Elle retourna sur la plage, appela ses amis les poissons. Ceux-ci partirent immédiatement et revinrent peu de temps après avec l’anneau.
« Bien, dit la vieille femme, maintenant vois-tu ces hautes montagnes ? Derrière, il y a une immense forêt, et plus loin encore se trouve une prairie. Tu y verras gambader un cheval blanc, ses yeux sont en forme de croissants de lune. C’est lui que tu dois rencontrer, il te faudra l’apprivoiser et il t’aidera à trouver ce que tu cherches. »
Rayon de lune partit, sans amis cette fois-ci. Elle n’avait pour seule compagnie que sa confiance et son courage. Elle franchit donc la montagne, traversa la forêt et arriva enfin dans la prairie, où caracolait effectivement un cheval blanc aux yeux croissants de lune. Elle s’avança lentement en fredonnant, un chant mystérieux qu’on entend seulement dans le silence des grands espaces marins ou célestes ; le chant des sirènes.
Le cheval, charmé, s’immobilisa d’un coup, laissa l’enfant s’approcher de lui. Il fit ensuite quelques pas pour réduire la distance qui les séparait. Le cheval écouta attentivement les confidences de l’enfant, puis il dit :
« Je vais t’emmener chez le Soleil, auprès de lui tu auras chaud, mais le chemin est long et, si je m’endors, nous tomberons tous les deux à nouveau dans la mer. Tu auras donc pour tâche de me chanter une chanson tout le temps que durera le voyage « .
Ainsi fut fait. Rayon de lune s’installa confortablement sur le dos du cheval et prit bien soin de ne jamais s’arrêter de chanter :
» A travers le ciel
Cheval mon ami
Galope vers la vie
Si douce au soleil »
Le cheval resta éveillé et déposa l’enfant au royaume du Soleil. Ce dernier la reçut comme sa propre fille. Le courage de Rayon de lune et son immense besoin de chaleur, effacèrent des années de fâcheries…
Terre, Lune et Soleil jouent maintenant dans un mouvement harmonieux leur rôle dans la vaste organisation de l’Univers. L’homme continue à interroger le ciel, approfondissant toujours sa connaissance des lois de la vie. Les enfants de la Terre lèvent les yeux vers les étoiles, ils savent qu’en protégeant notre planète bleue, celle-ci participera encore longtemps à la majestueuse ronde des planètes autour du soleil.
Si vous regardez bien le ciel, vous pourrez voir la Lune alors que le Soleil s’est levé, mais peut-être la verrez vous aussi alors que le Soleil n’est pas encore couché. Il suffit d’observer le ciel… la Lune est un astre élégant qui change souvent d’apparence.
Et le cheval ? me direz-vous. Il n’a pas oublié l’enfant, il la sait heureuse, et caracole de plus belle à cette idée. Parfois, vous verrez la nuit, un trait de lumière dans le ciel ; ce n’est pas une étoile filante mais un flash d’amour, un clair de lune qu’envoie l’enfant au cheval.
FIN
Conte écrit par Carmen Pennarun