Joies éphémères

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Une des joies éphémères de l’été, c’est de traverser une rivière en sautant sur des pierres.
On écarte les bras comme s’ils étaient des ailes. On appuie les mains sur l’air. On peut glisser, se mouiller un peu, beaucoup. […]
On ne sait pas a…lors qu’on est en train de traverser la chambre en feu de la vie, celle dont chaque fenêtre donne sur l’éternel.
On ne sait pas non plus qu’il est aussi indifférent de perdre que de gagner.
Il faudra encore des années pour comprendre que les années ne sont rien  et qu’il n’y a ni vrai, ni faux, juste la vie-mère
et nos bonds maladroits d’une parole à l’autre.
 
Christian Bobin in La grande vie
 
Et quelques mots, fébrilement assemblés…
 
jeux d’enfants / brindilles
le moulin rythme son va
au fil des murmures de l’eau
qui vient et se glisse
fuyante comme une anguille
 
Carmen P.

L’écheveau du temps

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L’homme est une perle

dans les mains du créateur

Univers en cloque

 

Ce n’est pas par dépit que la sensibilité s’enferme comme dans une huitre.

L’être humain protège ainsi son unité, car il se sent vulnérable dans la jungle de la matière.

Des années de maturation sont nécessaires avant que l’enfant craintif n’ose écarter les valves et se dise : « Après tout, je n’ai rien à cacher !»

Les mains calleuses de la vie se craquellent. L’étau de la prudence desserre sa prise et révèle sa charnelle puissance, palpitante de joie pour son protégé qu’il libère.

On ne voit pas cette emprise bienveillante qui nous enveloppe, comme des mains guérisseuses enserrent l’oisillon au cœur fragile, pourtant, cette poigne existe et jamais ne retient.

Chaleur de mains aimantes sur toute chose créée.

Respect du rythme de chaque créature.

Patience de l’infini devant nos petitesses qui tergiversent avant de se décider à aller au bout de leur partition sur l’écheveau terrestre où elles ont échoué.

 

Carmen P. (Erin)

 

… et sous forme de gogyohka :

 

L’homme est une perle
dans les mains du créateur
Univers en cloque
Patiente  l’infini
tandis que tergiversent nos petitesses

Nuit romantique

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Nuit romantique

deux arbres tricentenaires

veillent sur nos songes

 

Un lièvre — hautes pattes et grandes oreilles — prend le chemin…

son univers a du charme, il l’égaie par nature : il détale.

L’homme court plusieurs lièvres à la fois et en perd, souvent, le sentiment de la joie.

Une halte au Château du Pin nous délie des préoccupations qui ne sont pas essentielles.

 

Erin (Carmen P.)

L’ours et l’homme

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La terre est l’oreille de l’ours

et la peur le précède

 

L’homme marche sur le pas de l’animal

 

Du plus sombre des cavernes

où ils hibernent deux souffles

confondent la pureté de l’aube.

 

Puissent-ils dans cet em-

-pire matérialiste se lier

comme deux entités âme-

– mies___se laissant glisser

vers les chemins d’Ô

par la loutre espiègle

 

Une voie buissonnière

où se cueillent les signes

d’un pouvoir temporel

partagé existe

 

Par cœur le monde

 

Erin

Bouquet d’avril

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Bouquet d’avril

 

 

je contemple aux lisières du non-vécu

les rebords gris des vieux clichés

où des mondes se sont dissous

 

le regard est flouté qui passe par une vitre douteuse

 

pourtant

il n’y a pas de fenêtre

aussi sale soit-elle

par laquelle le créateur de l’être

ne puisse voir l’homme vivre

— l’un et l’autre font corps —

 

sur la paupière d’un œil-de-bœuf je dépose quelques fleurs de saison

 

Erin (Carmen P.)

La nativité

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La nativité,

quand le corps devenu berceau,

se prête à l’éclosion de la vie,

la femme, toute à la possession d’amour,

entrevoit une perte, inestimable, celle de sa propre enfance.

Etrangère à sa chair, tout lui devient étrange,

dans la déchirure d’une naissance, dans l’abondance d’un lait, dit nourricier

Les fibres de son être, stimulé à l’extrême, hors de son contrôle,

accélèrent leurs vibrations jusqu’à atteindre l’amplitude maximale

du don de soi. Le corps mute à ses risques et périls. Le corps s’emballe

 

On ne soupçonne pas la portée de cette éclosion,

elle déborde des apparences,

transcende la dimension corporelle.

Tandis que les bras enlacent le nouveau-né,

le cœur devine qu’il aura à se dilater, encore.

De jour en jour, d’année en année. Petit à petit,

il libèrera l’étreinte, dans l’acceptation de l’œuvre

du temps et la complicité de l’espace.

 

La mélancolie déferle par vagues sur les rives de la conscience intuitive,

jusqu’à ce que l’âme, à son tour, repousse les horizons.

Comme le corps engendre la vie, l’âme accompagne la croissance de l’enfant.

Elle demeure légère, car Cronos, son allier, lui permettra d’affronter

les inévitables, petites ou grandes, séparations futures.

Les épreuves seront comme des pas japonais dans la neige des lendemains, à franchir à cloche-pied.

Oui, à cloche-pied et le cœur léger, car seul le présent, dans la bulle des complicités quotidiennes, compte.

 

Naissance et mort parfois se liguent… on n’entend aucun cri, seul un silence

où la lame affûtée du destin rompt ses promesses. Une porte se ferme, un escalier est subtilisé.

Mais il n’y pas de porte et l’escalier s’est éboulé.

La conscience ne peut fuir la réalité, qu’elle doit accepter de regarder.

On se retrouve stupéfaite devant le vide. Inutile. Ceux qui nous aiment nous regardent angoissés; ils ne comprennent pas.

La raison, on la garde pour eux, même si leur amour ne peut se mesurer à l’absence.

La nature-mère préparée à la profusion doit calmer son flux.

L’expansion de tendresse après avoir chuté dans un abîme de détresse, reprendra son ascension vers un espace que l’intelligence humaine ignore.

Le chagrin s’ouvre ensuite sur la révélation de la présence aux autres,

et sur le don du bonheur souhaité, à chaque être croisé (surtout s’il vit la joie qui nous a été refusée).

 

Enfants,

où que vous soyez, c’est d’une maternelle caresse que mes pensées vous délient.

Dans la proximité de l’amour, je me réjouis de savoir que vous vivez, comme vous l’avez choisi, là où vous avez décidé de vous fixer.

Quelque part les racines se rejoignent.

Toujours.

 

Erin (Carmen P.)

Balades de mars

 

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mercredi 5 mars à Pléchatel

 

crépitements bleus
les pins dans le ciel de mars
éclatent leurs cônes

 

des écailles ouvertes

s’échappent les graines ailées

pinsons en raffolent

 

les chenilles hors de leur nid

sur le chemin processionnent

 

 

 

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dimanche 9 mars sur la Côte Sauvage

 

nimbée d’arcs-en-ciel

la vague en galop d’écume

assaille la roche

 

les flancs des mouettes

saturés d’émeraude

frôlent l’abîme

 

des boules comme neige

d’eau et d’air furibondes

roulent sur la plage

 

les barrières couchent leurs ombres

sur le sentier où je marche

cheveux au vent

 

Carmen P. (Erin)

Un pause

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Une pause
 
 
je viendrai moins
et c’est certain
une décision
au goût amer
du chant d’action
impose ornières…
 
Carmen P.
 
Un poème en cadeau, il est de Charles Le Quintrec :
 
Premier matin
—————–premier jardin
———————————–une lumière
Circule sur l’étang où s’ébattent des grues
Des enfants font des ricochets dans le soleil
Des femmes endormies – dormeuses demi-nues
Appellent des amours qui s’envolent joufflus
Vers les vignes
——————-le vin cette année sera clair
Allons les beaux enfants ! prenez votre musique
Et que danse la vie que nous aimons, la vie
Qui fait belle la femme au jardin que j’ai dit
Dans le premier matin où le mystère vibre.
 
 
Charles Le Qunintrec in La source et le secretAfficher la suite