Balades de mars

 

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mercredi 5 mars à Pléchatel

 

crépitements bleus
les pins dans le ciel de mars
éclatent leurs cônes

 

des écailles ouvertes

s’échappent les graines ailées

pinsons en raffolent

 

les chenilles hors de leur nid

sur le chemin processionnent

 

 

 

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dimanche 9 mars sur la Côte Sauvage

 

nimbée d’arcs-en-ciel

la vague en galop d’écume

assaille la roche

 

les flancs des mouettes

saturés d’émeraude

frôlent l’abîme

 

des boules comme neige

d’eau et d’air furibondes

roulent sur la plage

 

les barrières couchent leurs ombres

sur le sentier où je marche

cheveux au vent

 

Carmen P. (Erin)

Un pause

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Une pause
 
 
je viendrai moins
et c’est certain
une décision
au goût amer
du chant d’action
impose ornières…
 
Carmen P.
 
Un poème en cadeau, il est de Charles Le Quintrec :
 
Premier matin
—————–premier jardin
———————————–une lumière
Circule sur l’étang où s’ébattent des grues
Des enfants font des ricochets dans le soleil
Des femmes endormies – dormeuses demi-nues
Appellent des amours qui s’envolent joufflus
Vers les vignes
——————-le vin cette année sera clair
Allons les beaux enfants ! prenez votre musique
Et que danse la vie que nous aimons, la vie
Qui fait belle la femme au jardin que j’ai dit
Dans le premier matin où le mystère vibre.
 
 
Charles Le Qunintrec in La source et le secretAfficher la suite

Le messager d’amour

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Le messager d’amour

 

Je suis celui qui année après année frappe à la porte de ta vie.

Je suis le soleil… pour toi, je courbe ma lumière afin qu’elle vienne frôler les creux et les pleins  de ta silhouette que j’ai dessinée et  autour de laquelle  je gravite. Peu m’importent les lois du cosmos, plus je réfléchis et plus je pose sur ta peau mes éclats de tendresse. Quel est l’astre et quelle est la planète ?  Tout se confond dans l’instant amoureusement, et nos vies s’articulent dans un espace que rien n’offense.  

Je suis l’aimant, moi, le non créé, celui qui  n’existera pas tant que tu ne l’auras pas reconnu.

Je suis le prince des certitudes, celui devant qui personne ne peut rester de glace.

Pourtant tu continues de  m’ignorer.

Non, ne t’effarouche pas, je  laisserai au temps le soin de dissoudre tes appréhensions. 

Tu pleures ? Je suis avec toi, car je suis la larme qui dans ta bouche a le goût du sel.

Tu interroges le ciel, mais je ne peux te répondre car je ne connais pas le mode d’emploi de  l’amour sur terre. Je ne suis pas dans ton périmètre de vie, je ne suis pas de ton époque. Je suis de toujours et de maintenant, mais comment te le dire ? Je ne suis pas un expert  du vocabulaire du cœur. Les mots, si souvent, riment avec tromperie, alors, je garde ma déclaration pour un avenir dédié à la sensorialité que nous éprouvons déjà, d’une silencieuse étreinte.

Je garde espoir que tu me reconnaisses, ne dit-on pas qu’un mendiant d’amour, un jour, se hasarda dans la vallée des cœurs perdus où les soupirs donnaient récital et qu’il y trouva l’âme sœur !

Le rêve est le refuge où je dépose ma flamme. J’espère qu’une nuit, dans ton sommeil, tu entrouvriras la porte, ainsi tu libèreras les caresses qui n’attendent que le moment de parcourir le velours de ton corps autant que la sensibilité de ton âme.

Tu frémis déjà car je suis ton promis. La sensation de l’amour vibre comme une force tellurique bien avant que l’amour ne se manifeste. Sois attentive à son courant d’ondes, il est mon messager. 

 

Carmen P.

 

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Quatorze février

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Quatorze février 2014

 

Le vent souffle en rafales et la pluie de saison

vient grossir la rivière. L’eau, par-dessus

berges,  mouille le sol et la lande ruisselle.

Le tilleul danse, frénétique, ses branches oscillent

Temps/Temps/Temps, puis elles s’animent d’un mouvement

de giration, fluctuant. Pas d’inclinaison

tendre, ni vers le haut, ni vers l’espace, autour.

Du coup, même les tourterelles délaissent

brindilles et s’en vont roucouler sur une poutre

plus sûre. Elles pensent couvée, alors que l’homme

doute. Sous la pleine lune et son halo, si large

j’ai pourtant vu, quand la tourmente s’est calmée

deux amoureux, museau pointu contre museau

pareil, mener tintamarre sur le gazon

boueux. « Frr, frr, frr, frr… pensons à nous ma douce

hérissonne ! semblait dire monsieur, tentons

frasques nocturnes au nez des humains qui hibernent

dans leurs abris. Ils n’entendent pas la nature

qui appelle friponneries en cette nuit. »

 

Erin (Carmen P.)

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Agartha

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Agartha

 

chaque creux est le réceptacle

d’une larme essentielle

chaque gouffre est le puits

qui perfore notre nuit

 

nous sommes les spéléologues

de notre souterraineté

par les anfractuosité de nos blessures

quelquefois peut surgir la lumière

 

Erin

 

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Les cloches de l’invisible

Pour le thème de février de la communauté « Les passeurs de mots ».

 

téléchargement 

Les cloches de l’invisible

 

 C’était l’été de mes treize ans, je lisais encore « Mademoiselle âge tendre » et j’ignorais « Salut les copains ». Toute à mes activités estivales je ne savais pas que le monde béni de l’enfance allait bientôt, pour moi, perdre son charme. Je ne soupçonnais pas, non plus,  que dans quelques jours, on oublierait de me souhaiter mon anniversaire. L’heure allait sonner où le flux de la vie terrestre emporterait mon innocence et, avec elle, ma confiance et l’amitié.

Cette journée du mois d’août changea à jamais le profil de ma vie, mais personne ne le sut.

Le mois d’août, un bien joli mois consacré aux jeux, à la lecture… Mes parents travaillaient continuellement, ils ne prenaient jamais de vacances, ainsi, pour leur fille, chaque matin était l’annonce d’un merveilleux jour de liberté et de créativité.

J’étais fort occupée car nous allions recevoir la famille d’un de mes oncles. Ma mère s’occupait de la partie intendance et restauration, et moi, je prenais en charge les loisirs. Je m’affairais du matin au soir, préparant  de nombreuses activités pour mes cousins et cousines. Je souhaitais tant que leur séjour soit agréable et qu’ils demandent à leurs parents de revenir l’année suivante ! Parfois, l’idée m’effleurait que peut-être mes efforts allaient être vains, que mes cousins n’allaient pas apprécier les loisirs que j’avais imaginé… alors, pour satisfaire chacun, j’essayais de faire abstraction de mes propres goûts, de penser très fort à la personnalité de chacun, en fonction de mes souvenirs de l’été précédent. Ainsi, je ne risquais pas de me planter, même s’il restait une inconnue : en un an, chacun de nous avait pu  changer ! Je chassais vite mes doutes ;  si tous étaient  prêts à  y mettre de la bonne volonté, et moi en premier, pourquoi  penser à un quelconque désagrément et croire que mes propositions de jeux ou de sorties ne motiveraient personne. Les livres, classés par genre, attendaient de piquer la curiosité des lecteurs. Les activités manuelles et les jeux étaient préparés.  Le texte d’une pièce de théâtre était écrit – ne manquaient que les acteurs. Les pochettes de timbres attendaient d’être ventilées équitablement entre collectionneurs et amateurs de belles images…

C’est donc de pied ferme et le sourire au cœur que j’accueillis mes cousins.

Bérengère, l’aînée, me regarda d’un air supérieur, mais elle finit  par s’intéresser aux activités, Pierre, le plus jeune, resta, un premier temps, dans les jupes de sa mère, mais sa timidité ne dura pas, je parvins à l’intégrer à nos jeux. Marie Paule, qui avait le même âge que moi, et était devenue une jolie jeune fille, se montra aussi affable que les années précédentes.

Les cousins piquaient toujours  leur tente dans le pré face à la maison familiale.

Un après-midi, je proposai une promenade en forêt. Seule Marie-Paule accepta… Cela me réjouit, ainsi nous allions pouvoir marcher tranquillement tout en nous confiant nos secrets de l’année écoulée.

Le souffle des espoirs des collégiennes se mêla au chant des oiseaux et au silence des arbres. Jamais la forêt ne trahit les béguins dont elle entendit les noms chuchotés dans ses sentiers. Par moments, nous interrompions nos confidences, et nous nous  poursuivions en riant, puis nous nous  assîmes au pied d’un chêne, le temps de tisser deux couronnes de feuilles et de fleurs. Nous étions heureuses, à l’évidence cette année de maturité supplémentaire n’avait pas détruit nos liens d’amitié… les quelques jours de vacances à vivre ensemble promettaient d’être agréables.

Les couronnes sur nos têtes, nous reprîmes tranquillement le chemin du retour. C’était l’heure du goûter et notre promenade nous avait ouvert l’appétit.

— Attends, dis-je à ma cousine alors que nous longions le mur du cimetière, veux-tu que nous entrions ?

La proposition pouvait paraître insolite, je m’attendais à un refus de sa part. Je l’aurais bien compris, mais Marie-Paule n’était pas de nature contrariante, elle accepta. 

Je devinais, malgré tout,  ses réticences, alors je pris ma cousine par la main. C’est ainsi que nous poussâmes le portail et que, lentement, dans les allées du cimetière, se poursuivit notre curieuse exploration.

Nous nous arrêtions devant les tombes, lisant les dates inscrites sur le marbre, chaque dalle révélait une page de l’histoire de mon village… J’avais beaucoup d’imagination et je me tentais de ressentir ce qu’avait pu être la vie des personnes qui reposaient en terre. Devant chaque tombe visitée, nous déposions une feuille ou une fleur que nous  détachions de nos couronnes. Les gestes étaient calmes, les pensées pures, nous étions  présentes  aux gestes d’offrande et respectueuses du souvenir des morts.

Marie-Paule semblait maintenant rassurée. Tout était si calme en ce lieu. On ressentait le frémissement de l’air. On entendait le bourdonnement des insectes. Pas un homme.  Pas un chat. Au loin, le village. Ici, deux jeunes filles recueillies parmi les tombes.

Avant de quitter ce lieu, je proposai à ma cousine de faire une dernière pause devant le calvaire situé au centre du cimetière. Juste le temps d’une prière silencieuse… Je tenais à prier pour les personnes dont les tombes n’avaient pas arrêté mes pas. Toutes méritaient mon attention car ces personnes avaient vécu, elles avaient aimé, elles avaient foulé le même sol que celui où je me tenais à mon tour. Mes intentions,  je les concentrai dans une courte pensée. Marie-Paule  semblait aussi recueillie que moi.  Un sentiment profond d’amour et de calme était perceptible.

C’est cela Prier.

Je  fis le  signe de la croix, signe que ma cousine  répéta. Signe que nous allions partir.

C’est alors que nous prîmes conscience que quelque chose d’anormal se produisait. Il n’y avait plus de parfum. L’air était devenu statique. Les insectes ne scintillaient plus dans la lumière de l’après midi. Tout semblait étrange alors que nous nous trouvions à la même place quelques secondes auparavant. C’était le même lieu, il n’y avait que Marie-Paule et moi devant le grand calvaire mais, ce silence…  Ah ce silence, à couper le cerveau ! Tous nos sens aux aguets, nous tendîmes l’oreille…  Si, un son, il y avait un son, à peine audible, qui se laissait entendre… un son très léger de clochettes qui semblait venir de loin et progressivement se rapprochait. Ce bruit se multipliait, il  s’intensifiait. Il  prenait son temps pour gagner en volume. Lenteur et célérité se conjuguaient dans cette manifestation sonore qui atteignit un volume étonnant — ce volume, néanmoins,  n’agressait pas les tympans !

Autour de nous,  des cloches sonnaient à toute volée. Nous étions entourées d’une nuée de  cloches invisibles qui sonnaient de façon vertigineuse !

Nous étions au centre du tourbillon.

Marie-Paule s’était agrippée à mon bras et me serrait très fort. Nous étions comme soudées l’une à l’autre par la même stupeur…  Les cloches poursuivaient leur étrange manifestation… Marie-Paule eût un sursaut et me secoua, mais je ne bougeai pas. J’étais comme tétanisée par un phénomène dont je désirais connaître la cause.

Ma cousine me prit la main et me tira violemment : « Viens ! » dit-elle, mais je ne bougeai pas.

Viens ! répéta-t-elle en hurlant.

Son cri me sortit de l’état d’enchantement dans lequel je me trouvais et je repris contact avec la réalité. La panique s’empara de moi. La voix avait suffi pour rompre le charme et pour que la peur de Marie-Paule se communique. C’est la mort aux trousses et toujours main dans la main que nous laissâmes  le cimetière et ses cloches derrière nous. Nous  n’avions  jamais couru aussi vite !

 

À peine arrivées sur le terrain où campaient ses parents, Marie-Paule, toute excitée, raconta ce que nous venions de vivre. Personne n’y prêta attention. On nous demanda de nous taire ; les adultes avaient autre chose à faire que d’entendre des histoire sorties de l’imagination de deux adolescentes !

Quant à moi, je  ne dis rien. À quoi bon !

Si cette histoire ne fut tout d’abord pas écoutée, elle eut néanmoins pour conséquence d’écourter les vacances de mes cousins. Ma tante  ne supportait  pas de voir combien l’imagination de sa fille  se décuplait en ma présence.

Contrairement à moi, Marie-Paule parvint à se faire entendre par sa famille. Tous avaient compris qu’il s’était passé quelque chose de suffisamment grave pour qu’on sépare, à jamais, les deux cousines.

 

Carmen P. (Erin)

Janvier

 

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Janvier

 

C’est janvier qui nous fige

et pique ses banderilles

dans le cuir de l’ennui

 

L’ancien peut attendre

près du feu la visite

de qui saura lui rendre

les noms sur les clichés

Et tourne en rond le chat

au disque de l’horloge

il quête une grâce

ravaudeuse de temps

 

Et c’est une caresse

sur la courbe mémoire

qui déplie la couleur

d’un bleu mélancolie

dans le champ violet

gris comme la vie

sur son lit de p’tits riens

 

C’est janvier qui nous fige

et pique ses banderilles

dans le cuir de l’ennui

 

Dehors les narcisses

transpercent la terre

par la pluie attendrie

et les oiseaux s’affolent

dans le laurier vivace

ils écrivent des sons

que le colimaçon

de l’oreille décrypte

 

Sur ce parchemin

déroulé sous la lampe

telle une fenêtre

ouverte à la lumière

les vieux lisent du dedans

les mots qu’ils ont glané

et que la vie nous voile

 

C’est janvier qui nous fige

en silence le  givre

trompe les apparences

 

 le 30 janvier 2014

Le voile déchiré

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Le voile déchiré

 

 

Elle avait déchiré le voile et elle souffrait,

infiniment. Ses maux griffés dans le silence

d’une chambre de jeune fille troublaient son âme

 

Elle ne possédait de la vie que mille voix

qui la  hantaient, la laissant là sur le carreau

brisée, parmi les tesselles de ses rêves.

 

Seule, elle écrivait :

 

« Citadelle enflammée au bout du mirage…

Et l’avenir se retourne

Sur les pas de l’homme qui marche… »

 

N’oubliez pas l’enfant que le lait maternel

n’a pas nourri. Sa vie était de famine

et sa mort certaine. Le corps fuit la citadelle.

 

N’emmenez pas l’enfant, il n’est pas oublié,

il dort dans la mémoire des vivants qui l’aiment,

son absence est un éveil que les pleurs trahissent.

 

Seule, elle dansait :

 

« Noé a brûlé son Arche

Et la jungle s’est faite reine

Au milieu des catacombes… »

 

Les songes qui l’habillent sont les labyrinthes

où l’homme se perd tandis que sa robe froisse

la sauvagerie d’un monde inaccessible.

 

Etrangère à la jungle elle se pare de grâce,

s’excuse de ne vouloir annoter, à l’encre

noire, les lignes que traverse un arc en ciel.

 

Seule, elle pense encore :

 

« Les ordures fleurissent par tous les temps

Et la dent arrache les pétales.

Pour manger l’âme hostie ! »

 

À la lisière de l’éternité je tends

des feutres de couleurs, afin que s’écrive

la fleur d’espoir, avant l’extinction du soleil.

 

Erin (Carmen P.)

La Force

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La Force est la main qui caresse nos décisions

 

La Force, la onzième lame du Tarot, le lion dompté par une Vierge, est la carte sur laquelle s’appuient les valeurs morales en vue (en voie) d’une réalisation sur Terre.

Des questions s’imposent : Nos valeurs sont-elles morales ? La morale n’est-elle qu’affaire de bons sentiments ? D’ailleurs, que sont les bons sentiments ?

Notre égo, sous l’apparence des bons sentiments, ne nous laisse-t-il pas croire que nous sommes — une personne bien — d’une haute moralité ? Nous nous aveuglons nous-mêmes et, ainsi endormis, nous poursuivons notre existence en ignorant les cadavres que notre insouciance laisse derrière nous.

 

Purifier nos sentiments après les avoir reconnus, après les avoir nommés,  est notre première tâche.

Purifier jusqu’à la source de nous-mêmes, pas celle de l’autre.

Purifier jusqu’à l’innocence retrouvée.

 

Quel est ce lion qu’il nous faut dompter ? Celui qui en nous s’impatiente et ne demande qu’à être entendu. Provoquer sa force, avoir l’intention de le détruire serait peine perdue. Oublions la violence, préférons-lui une ferme détermination toute en rondeurs féminines. Douceur et subtilité, amour et bienveillance sont les armes dont nous disposons, elles nous permettent d’affronter les épreuves de la vie avec confiance.

L’usage de ces armes douces nous évitera d’avoir à revivre  toujours les mêmes expériences. Comme le lion que nous étions et qui tournait en rond dans sa cage, nous n’aurons plus à rugir devant la même porte, toujours fermée. En lieu et place de cette porte, la force domptée nous tend son échelle.

 

L’énergie, dans le tourbillon de sa puissance, nous demande de faire des choix, de définir ce que nous souhaitons vraiment. Cela vaut le coup d’y réfléchir car cette énergie conduira vraiment nos vœux jusqu’à leur réalisation. Tout ce qui compose notre univers est la résultante de nos désirs passés, même les plus fous.

 

Est-ce l’Or, sont-ce les honneurs que nous recherchons ou désirons-nous créer, dans le jardin de notre vie, une roseraie où ceux qu’on aime puissent venir respirer un peu de tendresse, celle qui, justement, génère la Force ?

 

Erin (Carmen P.) pour le dico-citation de la Communauté des Nuls

L’enfant de Syracuse (Volturno)

oeuvre qui a inspiré le texte

oeuvre d’Alechsinsky qui a inspiré le texte

Volturno

Novembre est le mois noir où le ciel s’ouvre à la tourmente d’équinoxe… les âmes des péris en mer seraient-elles blanches des terreurs qu’elles nous inspirent ? Le noir est une couleur de  saison qui nous protège d’un blanc trop lumineux. Se pourrait-il que notre œil, à certains moments de notre vie, ne puisse le fixer ?

Me vient à l’esprit la vision du paquebot noir ; le Volturno. Parti de Rotterdam, chargé d’immigrés et de produits hautement inflammables, il voguait vers New York qu’il n’atteignit  jamais. Onze navires sont venus à son secours, mais le naufrage était inévitable, et envoyer des canots  de sauvetage,  au vu de la puissance des vagues, était pure folie que les hommes, dans leur panique, ont tentée. Onze navires… … et moi je lance un SOS, attendant passivement une aide extérieure, au lieu de sonder ma tempête intérieure, au lieu  de retrouver la confiance qui était mienne, dans l’enfance, quand je savais  cueillir les grappes d’étoiles et que l’inconnu m’apparaissait comme une corne d’abondance riche d’expériences excitantes !

Je suis le cargo noir et mes signaux de détresse se noient dans la nuit. Je repousse mon avenir comme un horizon à grands coups d’hélice. Ma vie est un navire, un espace carcéral que j’ouvre, en pensées, à l’infini liberté du monde. Mes rêves sont des otages dociles en quête d’un ailleurs auquel ils ne croient plus. J’imagine le grand large, je crois espérer  mais, d’escale en escale, je m’enfonce dans un monde intérieur de renoncement et mes cales sont remplies de chimères.

Dans la mer démontée de la vie, je ne suis qu’un fétu… une écorce légère, un simple bois flotté qui n’offre aucune résistance. Même si j’étais arbre aux racines puissantes je ne serais rien face à la force des éléments, car le terrain sur lequel je suis planté glisse, impitoyablement.

Chacun rêve de maîtriser les forces élémentaires et, si le hasard lui permet de les éviter, il se pense invulnérable, mais la lecture de la nature, ou de toute œuvre d’art qui nous transporte,  nous met face à la réalité. Elle est toute autre.

La joie apparaît par intermittences mais ne demeure pas. Le bonheur, comme une lueur, surgit de la nuit, un instant, et y retourne. Le noir n’est pas une demeure à vie, il  est juste la lisière de notre appréhension à vivre, un moment de  confrontation avec le manque absolu de lumière — un manque sidéral, comme  l’espace  qui sépare, ou unit, deux étoiles.

Où est le blanc, où est le noir, quand la masse d’énergie qui soulève, vague après vague, le paquebot que je dessine, se fait successivement violence et calme ? L’obscur est en soi, dans ce corps sans lumière. J’accorde la vie au dehors, au monde extérieur, lui seul semble  posséder la clarté que je me refuse.

« L’encre de Chine est une drogue dure » disait Alechinsky. Alors j’y tremperai mon calame et, le sens de l’existence  qui m’échappe, je l’écrirai par de simples traits sur les blancs d’une feuille. Ils me permettront, peut-être, de concilier la violence et la paix, la beauté que j’entrevois et la mort qui m’envoûte, le dedans  de la tristesse et le dehors de la joie, la nuit d’encre et la voie lactée de mes espoirs.

Volturno, tant de solitude pour un paquebot qui a vu  l’océan basculer dans le vide ! Pourtant, la solitude a quelque chose de fini incompatible avec l’infini qui l’absorbe.

Ma solitude attend le creux de la vague et ne s’inquiètera pas du retour de la tempête. Je laisse les pensées de terre et je m’offre le point de vue du grand large, dessin après dessin, avec au cœur, l’imagination d’un bateau filant vers un ciel immense. Dans le blanc d’une feuille-mer froissée,  le steamer déploie le panache de sa fumée — noir de carbone.