Présence et rythme

Vivre la présence pénétrée par l’instant
sans rigidité, sans précipitation
au rythme lent
d’une éclosion perpétuelle
Savourer l’osmose entre le corps
et le paysage – sa déliquescence

Entendre sa propre voix
éclaircie de silences
se mêler au chant
de la nature, en transe
volupté, qu’un ondoiement
de serpent ou d’anguille
viendra troubler à l’improviste
signant la perte définitive du droit
d’oisiveté au jardin de Pomone

Une amibe s’anime
sous l’ombre du phénix
elle est le cri
elle est l’envol
que sa condition parasite

L’ennui reconnaît
les modulations d’une langue
qui s’invente au cœur de la cellule
L’affinement de la sensibilité
ébruite la souffrance face à l’inatteignable
attise l’impatience devant l’imperceptible
mouvement qui ne cesse de se languir
derrière l’immobilisme apparent

Le geste semble arrêté
la pensée lobotomisée
la parole murée
la féminité voilée
la croissance contrariée
l’univers condamné
quand la mainmise de la réalité
nous rend sourds aux révélations
du corps de lumière qui nous étoffe

Au moment précis où la situation
devient insoutenable , bloque l’action
nous réalisons combien les apparences
nous ôtent la liberté qu’une simple
amibe approche

.
Carmen P.

Le voile déchiré

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Le voile déchiré

 

 

Elle avait déchiré le voile et elle souffrait,

infiniment. Ses maux griffés dans le silence

d’une chambre de jeune fille troublaient son âme

 

Elle ne possédait de la vie que mille voix

qui la  hantaient, la laissant là sur le carreau

brisée, parmi les tesselles de ses rêves.

 

Seule, elle écrivait :

 

« Citadelle enflammée au bout du mirage…

Et l’avenir se retourne

Sur les pas de l’homme qui marche… »

 

N’oubliez pas l’enfant que le lait maternel

n’a pas nourri. Sa vie était de famine

et sa mort certaine. Le corps fuit la citadelle.

 

N’emmenez pas l’enfant, il n’est pas oublié,

il dort dans la mémoire des vivants qui l’aiment,

son absence est un éveil que les pleurs trahissent.

 

Seule, elle dansait :

 

« Noé a brûlé son Arche

Et la jungle s’est faite reine

Au milieu des catacombes… »

 

Les songes qui l’habillent sont les labyrinthes

où l’homme se perd tandis que sa robe froisse

la sauvagerie d’un monde inaccessible.

 

Etrangère à la jungle elle se pare de grâce,

s’excuse de ne vouloir annoter, à l’encre

noire, les lignes que traverse un arc en ciel.

 

Seule, elle pense encore :

 

« Les ordures fleurissent par tous les temps

Et la dent arrache les pétales.

Pour manger l’âme hostie ! »

 

À la lisière de l’éternité je tends

des feutres de couleurs, afin que s’écrive

la fleur d’espoir, avant l’extinction du soleil.

 

Erin (Carmen P.)