Contre mon coeur-cerisier

Photographie B. Pennarun, non libre de droit.

L’imaginaire est la clef dans la serrure du temps. Introduite à l’instant précis où le destin l’autorise, elle parvient à ouvrir la conscience à tous les possibles. Sous le faisceau du regard un monde fantastique s’anime et prend couleur. Il a la saveur des jours cerise.

*

J’accroche une échelle de fleurs
dans mon arbre

c’est pour toutes les pensées
étrangères
avant qu’elles ne deviennent
l’âme infidèle

Mon guide m’accompagne
et puis m’abandonne
car c’est à moi de compter
les noyaux – après la chair

Aucune roche n’est imprenable
l’esprit pénètre par les fissures
comme l’eau – mon enfant
comme l’eau s’infiltre

Le bonheur s’acclimate
il s’affirme en grimpant
du plus bas de la peur
et se hisse jusqu’au
panache de lumière
sans qu’aucune fleur
ne se ferme
et sans que tu ne lâches
ton rêve

*

La petite fille ne sait pas
qu’elle est née princesse
pas plus que le coquelicot
ne perçoit son propre éclat
et je raconte des histoires
qui dans mon coeur
forment mantra
dans l’ose ange
de mon esprit
.
_____Je
.
coeur____berce
.
____mon
.
pour que la petite fille
devienne fleur
tandis que les coquelicots
font la révérence
au bal des épis de blé
de ma conscience

.

Carmen P.

car la nuit sera bleue

 

nuit bleue avec Killian

 

L’enfant devenu grand

interroge la nature

car la nuit sera bleue

quand des larmes du jour

tomberont les mémoires

il faut tendre jouvence

aux parents tonnerre

et couver le pardon

d’un duvet d’innocence

laisser les beaux coups

d’indocilité

édifier notre fougue

la fuite n’est qu’illusoire

la paresse n’a pas sa place

ainsi la vie nous entortille

fredonnant en spirale

l’ascendance de son chant

et c’est m’aille que m’aille

qu’elle nous y implique

.Carmen P.

 

Mé… moi… re

Beatriz Martin Vidal

 

(moi… maman, je te re dessinerai une île où ton histoire sera sauve)

 

Du jour au lendemain la mémoire s’est verrouillée, le jour replié sur les souvenirs s’est fermé aux lendemains sans désir, et dans le vide d’un présent confiné la lente dessiccation des souvenirs, eux-mêmes, dépossède la victime de toute son histoire.

Oh, donnons-lui une histoire, n’importe laquelle, l’essentiel est qu’elle s’en souvienne ! Frappons son imagination et qu’elle l’emporte même si ce doit être dans la tombe !

L’enfant intérieur perdu dans une maison abandonnée cherche la voie du cœur – le moindre filon devient ruisseau sur lequel il s’embarque.

Imagine : Il y a un enfant en toi sur une toute petite barque. Comme celle-ci. Tiens, je te la donne. Vois-tu l’enfant ? Il rame avec toute l’énergie de sa confiance en l’amour qui ne peut, qui ne doit se tarir. Il est le gardien de ta mémoire. Elle survivra.

.

Carmen P.

.

image : Beatriz Martin Vidal

Juillet

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Les frissons légers des instants volés à la torpeur de juillet accrochent sur les pièges à rêves des  prises détonantes. Quand on libère ces souvenirs de leurs papillotes, ils pétillent et remplissent l’esprit de leurs bulles qui appellent le frisson d’une nouvelle vague.

Les éclairs de cœur annoncent plus de lumière que les aubes les plus lumineuses d’une quelconque île paradisiaque. 

Rien ne s’arrête vraiment derrière le rideau des apparences figées.

Non, rien ne s’arrête. Les évènements dans les coulisses se préparent à entrer en scène.

Le front sur la vitre, l’enfant regarde à l’intérieur. Il ne joue pas encore son rôle.

Le verre s’efface sous la pression du bleu, insistant. C’est maintenant à l’intérieur, tout à l’intérieur du cœur de la mère que la tige de son iris plonge et dans l’eau d’un  regard puise la force de l’épanouissement. Il est inflorescence, un tournesol, peut-être, qui cherche son soleil.

L’enfant reconnaît sa mère avant la conception. La mère accompagne ses pas bien au-delà des chemins de poussière car l’eau de l’amour transpire au travers des parois temporelles.

L’amour est un  jardin d’acclimatation.

L’indifférence est un leurre qui prend pour excuse la vitre et lui donne les pouvoirs d’une frontière. Ces limites ne sont qu’extérieures. La joie d’être coule à l’intérieur, elle ignore les limites.

Terre. Le champ de notre vision ne perçoit pas la nature illimitée des lendemains.

L’œil ne suit pas la ligne qui relie l’ombre, à peine marquée, à l’autre, feuillue, mais trop lointaine d’un ciel impassible.

Derrière la vitre l’enfant perce l’avenir en interrogeant ses racines. Ouvrons pour lui une fenêtre sur la clairière du présent où court l’impulsion d’une eau vive.

 

Erin (Carmen P.)

le 6 juillet 2015

photo : Elena Shumilova

Gestation

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1

La vie – pas un chat

La vie – de fil en aiguille

La vie mon fils

Se tait la mère – se terre

l’enfant dans un silence de matrice

 

2

Pas un chaton ni un poussin

La vie qui passe de mère en fils

La vie au loin qui naît enfant

dans un silence de matrice

.

En terre de femme serpentait l’annonce

 

3

 Sans bruit la conscience dépasse le mur de la réalité.

L’intuition sus-terraine, la pré-connaissance de chair voyagent en des arcanes que seule l’ubiquité de l’esprit fréquente. L’intelligence des gènes ignore les barrières géographiques et tout autant la profondeur des océans, elle s’appuie sur des ponts invisibles à la constance éthérique. La communication existe entre les gènes, les jeunes cellules peuvent compter sur le soutient des anciennes. La vie entre parenthèses, chez l’un, offre son énergie, envoie son souffle d’amour vers l’âme fragile qui doucement s’installe.

 

Erin

(illustration Susan Seddon Boulet)

Le voile déchiré

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Le voile déchiré

 

 

Elle avait déchiré le voile et elle souffrait,

infiniment. Ses maux griffés dans le silence

d’une chambre de jeune fille troublaient son âme

 

Elle ne possédait de la vie que mille voix

qui la  hantaient, la laissant là sur le carreau

brisée, parmi les tesselles de ses rêves.

 

Seule, elle écrivait :

 

« Citadelle enflammée au bout du mirage…

Et l’avenir se retourne

Sur les pas de l’homme qui marche… »

 

N’oubliez pas l’enfant que le lait maternel

n’a pas nourri. Sa vie était de famine

et sa mort certaine. Le corps fuit la citadelle.

 

N’emmenez pas l’enfant, il n’est pas oublié,

il dort dans la mémoire des vivants qui l’aiment,

son absence est un éveil que les pleurs trahissent.

 

Seule, elle dansait :

 

« Noé a brûlé son Arche

Et la jungle s’est faite reine

Au milieu des catacombes… »

 

Les songes qui l’habillent sont les labyrinthes

où l’homme se perd tandis que sa robe froisse

la sauvagerie d’un monde inaccessible.

 

Etrangère à la jungle elle se pare de grâce,

s’excuse de ne vouloir annoter, à l’encre

noire, les lignes que traverse un arc en ciel.

 

Seule, elle pense encore :

 

« Les ordures fleurissent par tous les temps

Et la dent arrache les pétales.

Pour manger l’âme hostie ! »

 

À la lisière de l’éternité je tends

des feutres de couleurs, afin que s’écrive

la fleur d’espoir, avant l’extinction du soleil.

 

Erin (Carmen P.)

Pour Fiona

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Pour Fiona

 

5 janvier

 

elle était fille

ange à la vie dérobée

froide comme l’hiver

 

Par l’aiguille amniotique

d’un amour incertain

s’est creusé le bulbe

où l’esprit paraissait

 

Aspiré le verbe

de ce corps flotté

et la douleur — seule

face au silence

figée

 

Entre sommet et gouffre

la poésie s’emmêle

éblouie par la mort

elle contemple l’en-terre

 

C’est l’argile qui s’enferre

sur des rails  disloqués

où la voix d’une enfant

plie au silence intimée

 

 Erin (Carmen P.)